Pour votre sécurité… 2/7
(…) Sous la douche la mémoire fonctionne. La tête pense.
À sept heures précises l’eau arrête de couler. Sans que j’aie rien demandé. C’est ainsi chaque jour. Vingt-cinq minutes d’eau à doucher ou à cuisiner. Qu’on soit seul ou plusieurs. Ensuite plus rien. Jusqu’au soir. Trente minutes. Retour de travail. Entre vingt heures et vingt heures trente. Pendant le journal télévisé radiodiffusé.
Le choix est conséquent. Être propre ou imaginer savoir ce qui passe.
Je sais qu’il ne passe rien de ce qui est raconté filmé mis en état. Alors je suis propre.
Gober n’est pas savoir. Regarder n’est pas voir. Entendre n’est pas comprendre. Avaler n’est pas digérer.
L’homme qui partage le lieu de douche nourriture est en mission maintenant. Ainsi je profite seule des cinquante-cinq minutes d’eau quotidiennes.
La vie en couple homme femme est obligatoire. Hors du travail uniquement. Là c’est interdit. L’ordre l’oblige. Il faut le respecter.
Passé vingt ans il faut être acoquiné. Accompagné surplace. Sans doute la promiscuité favorise-t-elle la reproduction. Celle que les ancêtres avaient tenté de maîtriser. La sexualité assumée. Tout comme le désir de procréation. Choisi. C’est ce qui se dit aux escaliers.
À partir de sept heures je dispose de trente minutes pour habiller. Nourrir. Déféquer et chasser au liquide chimique car l’eau n’est plus disponible. Laver les mains au papier enduit recyclable et quitter les lieux.
À sept heures trente la vidéosurveillance se met en route. Dans l’appartement. Si je ne suis pas sortie pour aller au travail c’est un premier appel téléphonique. Dans les deux minutes. Ce sont les détecteurs de présence qui signalent la mienne. Seules les toilettes sont libres de caméra.
Si je reste après l’appel les officiels arrivent. Ils sortent et descendent le retardataire dans la rue. Pour que je repère la file. Et que j’avance seule. Si je ne le peux pas complication radicale. (…)