Plus jamais elle dit 2/9
Épisode 2/9
Elle, elle est passée à la verticale de son lit sans rien commander. Épaules fichées contre le mur. Corps chaud. Chair de poule. Pores tendus et douloureux. Elle attend. Attend qu’il arrive. Certitude qu’il cherchera la chambre. Les yeux rivés à la porte elle fléchit à peine ses genoux et glisse le bras gauche vers le chevet. Trouve l’élastique. Rapide catogan. Son souffle siffle. Elle ferme la bouche. Avale le son. Contraint sa respiration à ralentir. Ouvre à nouveau la bouche, souffle trop bruyant dans sa tête. Silence de sa respiration. Léger mouvement dans l’appartement. L’air approche l’odeur étrangère.
Lui, il l’avait discrètement suivie. Avait attrapé ses habitudes comme on collectionne les points des paquets de pâte. Avec la nonchalance de celui qui sait qu’il parviendra à ses fins. Ce soir il est venu chercher sa récompense pour la grille pleine. Pesant ses pas et le bruit de ses semelles sur le béton de la terrasse il s’est glissé dans l’ouverture de la baie vitrée. Parquet du salon. Chaque meuble à sa place il l’aurait parié ! Sourire. Renforcement de sa croyance en son indéfectible plan. Il sent la tension dans son caleçon. Caresse et flatte l’amour de sa vie. L’air qui entre frôle ses oreilles. Ressac de marée basse. Il pense à la compensation qu’il est sur le point s’offrir. Sourire carnassier.
Elle, elle ne sait pas ce qui lui passe par la tête. Dès qu’elle a vu la porte de sa chambre s’ouvrir elle s’est sentie s’agiter. Enclenchement de l’interrupteur. Lumière crue. Raidissement dans son échine. Dans son dos. Contraction de ses bras. Elle veut les abaisser en vain. Coincés les bras. Coincés pour attraper. Serrer. Bousiller. Elle se sent piétinée. Une violence inquiétante remonte de son ventre. Éructe dans l’appartement. Une force venue d’ailleurs la déprend. Douleur antédiluvienne. Elle sent son corps quitter son corps. Elle ne se contient plus. Elle déborde. Agit malgré elle. (…)