Fête de la musique
Elles avancent l’une vers l’autre. Se sourient. Sur ce bout de trottoir, elles sont seules au monde. L’une lève les bras au ciel, l’autre fond contre elle. Elles s’enlacent. S’embrassent. Se regardent. S’enlacent encore.
L’une prend la parole. L’autre répond à grands gestes. Elles rayonnent. Dégagent quelque chose de léger. Sont heureuses. Les passants circulent autour d’elles. Parmi eux, certains les regardent hébétés comme choqués. Le bonheur d’autrui, ce dérangement. Elles discutent encore.
Dans le lointain, le fracas d’un pot d’échappement réduit l’espace sonore. Le bruit approche à grande vitesse. En attendant que ça file, l’une suspend sa parole. L’autre se prend à mimer. Elles rient aux éclats dans le fracas du motard.
Le son s’estompe. Chacun respire et s’enorgueillit d’avoir conservé ses oreilles intactes. Une mobylette dont le moteur crachote déboule maintenant dans l’espace scénique. Elles, elles continuent d’alterner paroles et mimes. Ravies. Réjouies même.
Passage du deux roues. La rue tente de retrouver un certain apaisement. Les voix s’échangent à nouveau. Leur conversation va bon train. Au fracas d’un camion de livraison qui déboule dans la rue sans crier gare, porte cognant contre les cloisons métalliques agitées, elles décident de trouver refuge dans le café du Commerce.
Grands gestes de l’une, sourires et conversation criée aux oreilles, elles poussent la porte vitrée et entrent. La musique techno les accueille. La fête de la musique battra son plein ce soir, l’heure est aux réglages de sonorisation.