En vol
Ils sont jeunes. Se sentent libres et se croient tout permis.
Assis près de la fenêtre de l’avion, ils se jouent le grand jeu de la comédie de la vie. Elle, aimante, démonstrative et attentionnée envers lui, jeune adulte immature tentant péniblement la mue en homme.
Ils parlent fort. Veulent être entendus. Leurs répliques rythmées par leurs voix travaillées. Les rôles sont appris. Déroulés sans encombre.
Magazine de pacotille, moquerie masculine envers légèreté féminine. Air contrit en échange d’une caresse tendre qu’une mère prodiguerait à son jeune fils insolent. Ils sont en couple et se trompent de ligne… déjà. Posture mal digérée de ce que l’on croit être aimer.
Il énonce crânement vouloir dîner chez MacDo. Atone, elle repète l’affirmation comme on tente une question. Il confirme ses dires, sa fierté le trahit.
Dans l’avion, deux nourrissons pleurent. Le couple au grand jeu se sent spontanément excédé. Agitation. Mots plus forts. Menaces de coups à l’encontre des enfants dont les pleurs évoquent, pour elle, les cris du cochon assassiné. Elle s’improvise paysanne ne tient plus son rôle car elle n’a jamais rien entendu de tel : sa comparaison est inepte.
Il veut aller au cinéma ce soir. Pas encore descendu de l’avion qu’il organise les retrouvailles avec quelque ami. On joue Pirate des Caraïbes. Il ne peut attendre. Elle tente une négociation, un report à demain. Il a décidé, c’est trop tard. Elle peut rentrer si elle veut.
Mais non, elle ne veut pas rentrer à la maison ce soir.